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Francis Maurice :-)

Une histoire de famille... :-)

***

15:51

Arrivée à la maternité. Une infirmière souriante nous accueille dans une salle d'attente. Puis elle me jette un regard froid en m'observant de la tête aux pieds:

- « Vous souhaitez assister à l'accouchement ? »

Je réponds un peu bégayant que j'aimerais bien, enfin autant que possible. Elle me désigne une rangée de sièges en plastique orange et me fait savoir qu'on me préviendra en temps voulu.

Puis ils disparaissent derrière une lourde porte en verre armé encadrée d'un espèce de jaune d'une moutarde dont seraient friands les anglo-saxons.

Je vais donc prendre place sur un des sièges orange faisant face à cette porte à ouveture automatique que je n'ose plus quitter des yeux.

Une infirmière, un peu forte, passe la porte qui s'ouvre et me laisse entrevoir Svatava. Vêtue d'un peignoir blanc, accroupie, elle farfouille dans son sac. Dans un léger ronflement de moteur, la porte automatique se referme en laissant deviner Svatava en ombre chinoise. Je la distingue encore un instant avant que d'autres ombres la rejoignent pour se mélanger et disparaître.

Je prends mon mal en patience. Une angoisse diffuse m'envahit, me poussant des larmes au fond des yeux.

16:07

Un jeune homme accompagné d'une jeune femme, infirmier ou docteure, pénètrent à leur tour dans le couloir caché par la grosse porte découlinant de moutarde pour anglo-saxons. Tout redevient calme et tranquille. Dans le silence, à peine troublé par le grésillement des lampes à néon, il ne me reste plus qu'à imaginer les procédures, les examens, les ultrasons, les éprouvettes, les tubes, les rayons-x, les pinces, les becs bunsen, les paillasses, les tripaliums...

A l'autre bout du couloir, les cris feutrés d'un nourrisson résonnent...

Une jolie Rome, entre deux âges, passe sans me voir. Elle aussi tire une carte de sa poche et la pose sur un petit boitier rouge qui émet immédiatement un petit bip retentissant. La porte en verre pleine de moutarde jaunâtre se met en branle et s'ouvre dans un murmure mécanique.

16:15

Je profite de l'ouverture pour jeter un coup d'oeil dans le couloir interdit aux profanes. Tout y est toujours trop calme et trop tranquille, mais l'angoisse s'apaise un peu, ma respiration redevient presque normale, je n'ai toujours pas envie de fumer.

16:19

Par acquis de conscience, je me lève pour vérifier que la petite salle, séparée de ma rangée de sièges orange par une grande baie vitrée, ne serait pas un espace réservé aux fumeurs. Comme je me sens coupable d'abandonner mon poste, je jette un œil sur la porte au verre armé encadré de moutarde sucrée pour vérifier qu'elle reste bien fermée. J'avance de quelques mètres et passe la tête derrière la baie vitrée. J'observe la petite salle dont les fenêtres ouvertes donnent sur le jardin : l'absence de cendriers me désole. J'essaie alors de m'imaginer prendre le long couloir en sens inverse, descendre les escaliers déboulant à côté d'une machine à café du rez-de-chaussée, à quelques mètres d'une petite entrée, elle aussi en verre, mais à laquelle on aura eu la bonne idée d'épargner le cadre en moutarde et qui pourtant permet d'accéder enfin au parking, dernier rendez-vous des pots d'échappement et des tabagistes.

Un nouveau cri d'enfant me ramène à la réalité, je fais demi-tour pour reprendre mon poste d'observation.

16:25

Un jeune homme, portant barbe de quelques jours, arrive à son tour, tire une carte de sa poche et la passe devant le boitier rouge de commande de la porte à la moutarde. Il a l'air nonchalant, content de lui, jouissant de toute sa puissance et du privilège exhorbitant de profiter de sa carte magique ouvrant les portes pleines de moutarde jaunâtre pour anglo-saxons. J'en profite pour scruter tout cet univers mystérieux qui se dévoile une poignée de secondes, un ombre au loin s'affère...et puis, plus rien...la moutarde et tout le reste en verre armé s'est remis en place.

16 :27

L'homme décontracté et mal rasé ressort déjà. C'est sûrement un spécialiste chargé du contrôle des boitiers rouges et des portes encadrées de moutarde...

16:30

On entend un bébé pleurer et des voix fuser de tous côtés...

16:53

Une minute plus calme. Svatava est allée s'isoler dans le cabinet de toilette de la chambre de travail. Le lavement est en train de faire son effet...une douche suivra...

Je ne sais plus à quoi je pensais à 16:30 quand l'infirmière, apparue magiquement encadrée de moutarde, me fît un petit signe de la tête et m'invita à la suivre. Je bondis aussitôt, me réjouissant de découvrir enfin tout cet univers mystérieux que cachait la porte en verre armé et sa moutarde. L'infirmière me désigna un vestaire et son placard et, en me tendant un paquet bleu, elle m'ordonna de me changer. Elle me dit de la rejoindre au fond du couloir où elle m'attendrait et surtout, d'arrêter de rouler des yeux comme ça parce que ça n'avait pas encore commencer !

Une fois mon costume de Schtroumpf enfilé, je longeais enfin ce couloir qui m'avait tant intrigué et dont, en fin de compte, je me moquais comme d'une guigne. Je cherchais désespérment du regard ma guide et quand je l'aperçus elle me désigna une large porte blanche :

- « C'est ici ! »

Derrière, une grande chambre remplie d'objets plus saugrenus les uns que les autres, des longs, des ronds, des mous, des brillants, des moins souples et plus carrés ou éléctriques, voire nucléaires, et émettant tout un tas de bip et de tut, et miraculeusement tout ce bazar semble occupé sa place, calme et tranquille, éclairée chaudement par la lumière douce que donne la grande fenêtre.

Svatava était allongée sur un lit austère et fonctionnel, le ventre à l'air. Une grande blonde en blouse bleue venait d'entrer dans la chambre pour lui aposer un appareil de science-fiction sur sa rondeur de parturiente. Des images à décrypter s'affichaient sur un écran juste devant elle, mais je ne me souviens pas de les avoir regardées. J'ai saisi la main de Svatava, ses yeux brillaient, elle me souriait en grimaçant

- « C'est vraiment pour aujourd'hui ? »

- « C'est sûrement pas pour la semaine prochaine ! »

On en a ri, c'était la vie...

La grande blonde en blouse bleue semblait parler devant son écran, Svatava semblait lui répondre, mais dorénavant, rien n'aurait pu m'arracher à la contemplation de ces étranges images en noir et blanc, qui dansaient sur l'écran et que je regardais enfin, les détaillant dans les moindres pixels. Rien, sauf la lumière, la douce pression de la main de Svatava dans la mienne, une tendre chaleur, la joie d'être avec elle...

...avec eux.

17h10

Svatava sort du cabinet de toilette et puis tout s'accélère, tout ne devient que cris, râles et crispations, des cris encore, des coups, des grincements de dents et encore des cris.

17:30

La grande blonde en blouse bleue est de retour. Elle pousse devant elle d'autres écrans trônant sur des appareils qui vont tous faire bip et tut et qui lançent leurs électrodes comme un poulpe électrique se saisissant de ses proies sans défense. Une fois relâchée des étreintes de la machine vorace, Svatava se retrouve assise sur un gros ballon gris bleu censé l'aider à retrouver un confort relatif, mais peu lui en chaut, elle continue à crier...

18:25

Svatava a disparu derrière la porte du cabinet de toilette, la grande blonde en blouse bleue lui a injecté un léger euphorisant. On l'entend chantonner entre deux gémissements de douleur.

18:35

C'est enfin l'heure de la dent en or, elle orne la bouche de la sage-femme. Je suppose qu'on parle, je n'entends que des cris...et puis...

...

Il est là ! Ses cheveux tout collés de sang surgissent. Sa maman sert encore les dents et pousse un dernier cri. Il est là ! Il arrive, tout va bien. Des mains agiles, je ne sais plus combien, s'occupent du cordon ombilical alors que la dernière blouse blanche, qui se tenait bien cachée dernière nous, le saisit à bout de bras pour le brandir comme un trophée.

Il pousse un petit cri !

 

Il est là !

 

- « Comment s'appelle-t-il ? » nous demande la blouse blanche.

 

Sa maman ne trouve pas la force de répondre, son papa sanglotte et tente en vain d'articuler...

 

Et la blouse blanche d'emporter déjà au loin ...

 

...Francis Maurice !

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Liberec, le 25 juin 2013, 19:35

 

***

...un Francis peut en cacher un autre ;-)

 

...

 

un Maurice aussi :-)

 

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 ***

 

 

 

 Félix Leclerc - 1954

 

Francis, où vas-tu ?
T'effraies les enfants sur la rue
Francis, ton chapeau
A l'air d'une env'loppe de coco

Francis, où couches-tu ?
Dans l'étable comme le p'tit Jésus
Francis, t'es tout nu
Pends-toi et qu'on n'en parle plus !

Francis, si t'as faim
Tu peux toujours manger du pain
Y'en a plein, tu vois bien
Aux vitrines des grands magasins

Francis, si tu veux

Tu vas patienter encore un peu...
Bientôt le printemps
Viendra parfumer tes vêtements

Tu vois bien qu'il se prépare
Derrière la montagne, il démarre
Francis, tous les oiseaux du monde
Viendront te chanter une ronde

Prends courage, Francis...

***

 

 

 

 

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