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Arthur Conan Doyle
UN SCANDALE EN BOHÊME
Les aventures de Sherlock Holmes
(juillet 1891)
Édition du groupe « Ebooks libres et gratuits »
Table des matières
I................................................................................................. 3
II ..............................................................................................18
III............................................................................................ 33
Toutes les aventures de Sherlock Holmes ............................. 39
À propos de cette édition électronique .................................. 42
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I
Pour Sherlock Holmes, elle est toujours la femme. Il la juge
tellement supérieure à tout son sexe, qu’il ne l’appelle presque
jamais par son nom ; elle est et elle restera la femme.
Aurait-il donc éprouvé à l’égard d’Irène Adler un sentiment
voisin de l’amour ? Absolument pas ! Son esprit lucide, froid,
admirablement équilibré répugnait à toute émotion en général et
à celle de l’amour en particulier. Je tiens Sherlock Holmes pour la
machine à observer et à raisonner la plus parfaite qui ait existé
sur la planète ; amoureux, il n’aurait plus été le même. Lorsqu’il
parlait des choses du coeur, c’était toujours pour les assaisonner
d’une pointe de raillerie ou d’un petit rire ironique. Certes, en
tant qu’observateur, il les appréciait : n’est-ce pas par le coeur que
s’éclairent les mobiles et les actes des créatures humaines ? Mais
en tant que logicien professionnel, il les répudiait : dans un
tempérament aussi délicat, aussi subtil que le sien, l’irruption
d’une passion aurait introduit un élément de désordre dont aurait
pu pâtir la rectitude de ses déductions. Il s’épargnait donc les
émotions fortes, et il mettait autant de soin à s’en tenir à l’écart
qu’à éviter, par exemple de fêler l’une de ses loupes ou de semer
des grains de poussière dans un instrument de précision. Telle
était sa nature. Et pourtant une femme l’impressionna : la femme,
Irène Adler, qui laissa néanmoins un souvenir douteux et discuté.
Ces derniers temps, je n’avais pas beaucoup vu Holmes. Mon
mariage avait séparé le cours de nos vies. Toute mon attention se
trouvait absorbée par mon bonheur personnel, si complet, ainsi
que par les mille petits soucis qui fondent sur l’homme qui se crée
un vrai foyer. De son côté, Holmes s’était isolé dans notre meublé
de Baker Street ; son goût pour la bohème s’accommodait mal de
toute forme de société ; enseveli sous de vieux livres, il alternait la
cocaïne et l’ambition : il ne sortait de la torpeur de la drogue que
pour se livrer à la fougueuse énergie de son tempérament. Il était
toujours très attiré par la criminologie, aussi occupait-il ses dons
exceptionnels à dépister quelque malfaiteur et à élucider des
énigmes que la police officielle désespérait de débrouiller. Divers
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échos de son activité m’étaient parvenus par intervalles :
notamment son voyage à Odessa où il avait été appelé pour le
meurtre des Trepoff, la solution qu’il apporta au drame ténébreux
qui se déroula entre les frères Atkinson de Trincomalee, enfin la
mission qu’il réussit fort discrètement pour la famille royale de
Hollande. En dehors de ces manifestations de vitalité, dont j’avais
simplement connaissance par la presse quotidienne, j’ignorais
presque tout de mon ancien camarade et ami.
Un soir – c’était le 20 mars 1888 – j’avais visité un malade et
je rentrais chez moi (car je m’étais remis à la médecine civile)
lorsque mon chemin me fit passer par Baker Street. Devant cette
porte dont je n’avais pas perdu le souvenir et qui sera toujours
associée dans mon esprit au prélude de mon mariage comme aux
sombres circonstances de l’Étude en Rouge, je fus empoigné par
le désir de revoir Holmes et de savoir à quoi il employait ses
facultés extraordinaires. Ses fenêtres étaient éclairées ; levant les
yeux, je distingue même sa haute silhouette mince qui par deux
fois se profila derrière le rideau. Il arpentait la pièce d’un pas
rapide, impatient ; sa tête était inclinée sur sa poitrine, ses mains
croisées derrière son dos. Je connaissais suffisamment son
humeur et ses habitudes pour deviner qu’il avait repris son
travail. Délivré des rêves de la drogue, il avait dû se lancer avec
ardeur sur une nouvelle affaire. Je sonnai, et je fus conduit à
l’appartement que j’avais jadis partagé avec lui. Il ne me prodigua
pas d’effusions. Les effusions n’étaient pas son fort. Mais il fut
content, je crois, de me voir. A peine me dit-il un mot. Toutefois
son regard bienveillant m’indiqua un fauteuil ; il me tendit un
étui à cigares ; son doigt me désigna une cave à liqueurs et une
bouteille d’eau gazeuse dans un coin. Puis il se tint debout devant
le feu et me contempla de haut en bas, de cette manière
pénétrante qui n’appartenait qu’à lui.
« Le mariage vous réussit ! observa-t-il. Ma parole, Watson,
vous avez pris sept livres et demie depuis que je vous ai vu.
– Sept, répondis-je.
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– Vraiment ? J’aurais cru un peu plus. Juste un tout petit peu
plus, j’imagine, Watson. Et vous avez recommencé à faire de la
clientèle, à ce que je vois. Vous ne m’aviez pas dit que vous aviez
l’intention de reprendre le collier !
– Alors, comment le savez-vous ?
– Je le vois ; je le déduis. Comment sais-je que récemment
vous vous êtes fait tremper, et que vous êtes nanti d’une bonne
maladroite et peu soigneuse ?
– Mon cher Holmes, dis-je, ceci est trop fort ! Si vous aviez
vécu quelques siècles plus tôt, vous auriez certainement été brûlé
vif. Hé bien ! oui, il est exact que jeudi j’ai marché dans la
campagne et que je suis rentré chez moi en piteux état ; mais
comme j’ai changé de vêtement, je me demande comment vous
avez pu le voir, et le déduire. Quant à Mary-Jane, elle est
incorrigible ! ma femme lui a donné ses huit jours ; mais là
encore, je ne conçois pas comment vous l’avez deviné. »
Il rit sous cape et frotta l’une contre l’autre ses longues mains
nerveuses.
« C’est d’une simplicité enfantine, dit-il. Mes yeux me disent
que sur le côté intérieur de votre soulier gauche, juste à l’endroit
qu’éclaire la lumière du feu, le cuir est marque de six égratignures
presque parallèles ; de toute évidence, celles-ci ont été faites par
quelqu’un qui a sans précaution gratté autour des bords de la
semelle pour en détacher une croûte de boue. D’où, voyez-vous,
ma double déduction que vous êtes sorti par mauvais temps et
que, pour nettoyer vos chaussures, vous ne disposez que d’un
spécimen très médiocre de la domesticité londonienne. En ce qui
concerne la reprise de votre activité professionnelle, si un
gentleman qui entre ici, introduit avec lui des relents
d’iodoforme, arbore sur son index droit la trace noire du nitrate
d’argent, et porte un chapeau haut de forme pourvu d’une bosse
indiquant l’endroit où il dissimule son stéthoscope, je serais en
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vérité bien stupide pour ne pas l’identifier comme un membre
actif du corps médical. »
Je ne pus m’empêcher de rire devant l’aisance avec laquelle il
m’expliquait la marche de ses déductions.
« Quand je vous entends me donner vos raisons, lui dis-je, les
choses m’apparaissent toujours si ridiculement simples qu’il me
semble que je pourrais en faire autant ; et cependant chaque fois
que vous me fournissez un nouvel exemple de votre manière de
raisonner, je reste pantois jusqu’à ce que vous m’exposiez votre
méthode. Mes yeux ne sont-ils pas aussi bons que les vôtres ?
– Mais si ! répondit-il en allumant une cigarette et en se
jetant dans un fauteuil. Seulement vous voyez, et vous n’observez
pas. La distinction est claire. Tenez, vous avez fréquemment vu
les marches qui conduisent à cet appartement, n’est-ce pas ?
– Fréquemment.
– Combien de fois ?
– Je ne sais pas : des centaines de fois.
– Bon. Combien y en a-t-il ?
– Combien de marches ? Je ne sais pas.
– Exactement ! Vous n’avez pas observé. Et cependant vous
avez vu. Toute la question est là. Moi, je sais qu’il y a dix-sept
marches, parce que, à la fois, j’ai vu et observé. A propos, puisque
vous vous intéressez à ces petits problèmes et que vous avez été
assez bon pour relater l’une ou l’autre de mes modestes
expériences, peut-être vous intéresserez-vous à ceci… – Il me
tendit une feuille de papier à lettres, épaisse et rose, qui se
trouvait ouverte sur la table. – Je l’ai reçue au dernier courrier,
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reprit-il. Lisez à haute voix. » La lettre n’était pas datée, et elle ne
portait ni signature ni adresse de l’expéditeur :
« On vous rendra visite ce soir à huit heures moins le quart.
Il s’agit d’un gentleman qui désire vous consulter sur une affaire
de la plus haute importance. Les récents services que vous avez
rendus à l’une des cours d’Europe ont témoigné que vous êtes un
homme à qui on peut se fier en sécurité pour des choses
capitales. Les renseignements sur vous, nous sont, de différentes
sources, venus. Soyez chez vous à cette heure-là, et ne vous
formalisez pas si votre visiteur est masqué. »
« Voilà qui est mystérieux au possible ! dis-je. A votre avis,
qu’est-ce que ça signifie ?
– Je n’ai encore aucune donnée. Et bâtir une théorie avant
d’avoir des données est une erreur monumentale : insensiblement
on se met à torturer les faits pour qu’ils collent avec la théorie,
alors que ce sont les théories qui doivent coller avec les faits. Mais
de la lettre elle-même, que déduisez-vous ? J’examine
attentivement l’écriture, et le papier.
– Son auteur est sans doute assez fortuné, remarquai-je en
m’efforçant d’imiter la méthode de mon camarade. Un tel papier
coûte au moins une demi-couronne le paquet : il est
particulièrement solide, fort.
– Particulièrement : vous avez dit le mot. Ce n’est pas un
papier fabriqué en Angleterre. Regardez-le en transparence. »
J’obéis, et je vis un grand E avec un petit g, un P, et un grand
G avec un petit t, en filigrane dans le papier.
« Qu’est-ce que vous en pensez ? demanda Holmes.
– Le nom du fabricant, probablement ; ou plutôt son
monogramme.
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– Pas du tout. Le G avec le petit t signifie Gesellschaft, qui est
la traduction allemande de « Compagnie ». C’est l’abréviation
courante, qui correspond à notre « Cie ». P, bien sûr, veut dire
« Papier ». Maintenant voici Eg. Ouvrons notre Informateur
continental… »
Il s’empara d’un lourd volume marron.
« Eglow, Eglonitz… Nous y sommes : Egria, située dans une
région de langue allemande, en Bohême, pas loin de Carlsbad.
“Célèbre parce que Wallensten y trouva la mort, et pour ses
nombreuses verreries et papeteries.” Ah, ah ! mon cher, qu’en
dites vous ? Ses yeux étincelaient ; il souffla un gros nuage de
fumée bleue et triomphale.
– Le papier a donc été fabriqué en Bohême, dis-je.
– En effet. Et l’auteur de la lettre est un Allemand. Avez-vous
remarqué la construction particulière de la phrase : “Les
renseignements sur vous nous sont de différentes sources
venus.” ? Ni un Français, ni un Russe ne l’aurait écrite ainsi. Il n’y
a qu’un Allemand pour être aussi discourtois avec ses verbes. Il
reste toutefois à découvrir ce que me veut cet Allemand qui
m’écrit sur papier de Bohême et préfère porter un masque plutôt
que me laisser voir son visage. D’ailleurs le voici qui arrive, sauf
erreur, pour lever tous nos doutes. »
Tandis qu’il parlait, j’entendis des sabots de chevaux, puis un
grincement de roues contre la bordure du trottoir, enfin un vif
coup de sonnette. Holmes sifflota.
« D’après le bruit, deux chevaux !… Oui, confirma-t-il après
avoir jeté un coup d’oeil par la fenêtre un joli petit landau, conduit
par une paire de merveilles qui valent cent cinquante guinées la
pièce. Dans cette affaire, Watson, il y a de l’argent à gagner, à
défaut d’autre chose !
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– Je crois que je ferais mieux de m’en aller, Holmes.
– Pas le moins du monde, docteur. Restez à votre place. Sans
mon historiographe, je suis un homme perdu. Et puis, l’affaire
promet ! Ce serait dommage de la manquer.
– Mais votre client…
– Ne vous tracassez pas. Je puis avoir besoin de vous, et lui
aussi. Le voici. Asseyez-vous dans ce fauteuil, docteur, et soyez
attentif. » Un homme entra. Il ne devait pas mesurer moins de
deux mètres, et il était pourvu d’un torse et de membres
herculéens. Il était richement vêtu : d’une opulence qui, en
Angleterre, passait presque pour du mauvais goût. De lourdes
bandes d’astrakan barraient les manches et les revers de son
veston croisé ; le manteau bleu foncé qu’il avait jeté sur ses
épaules était doublé d’une soie couleur de feu et retenu au cou par
une aigue-marine flamboyante. Des demi-bottes qui montaient
jusqu’au mollet et dont le haut était garni d’une épaisse fourrure
brune complétaient l’impression d’un faste barbare. Il tenait un
chapeau à larges bords, et la partie supérieure de son visage était
recouverte d’un masque noir qui descendait jusqu’aux
pommettes ; il avait dû l’ajuster devant la porte, car sa main était
encore levée lorsqu’il entra. Le bas du visage révélait un homme
énergique, volontaire : la lèvre épaisse et tombante ainsi qu’un
long menton droit suggéraient un caractère résolu pouvant aller à
l’extrême de l’obstination.
« Vous avez lu ma lettre ? demanda-t-il d’une voix dure,
profonde, fortement timbrée d’un accent allemand. Je vous disais
que je viendrais… »
Il nous regardait l’un après l’autre ; évidemment il ne savait
pas auquel s’adresser.
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« Asseyez-vous, je vous prie, dit Holmes. Voici mon ami et
confrère, le docteur Watson, qui est parfois assez complaisant
pour m’aider. A qui ai-je l’honneur de parler ?
– Considérez que vous parlez au comte von Kramm,
gentilhomme de Bohême. Dois-je comprendre que ce gentleman
qui est votre ami est homme d’honneur et de discrétion, et que je
puis lui confier des choses de la plus haute importance ? Sinon, je
préférerais m’entretenir avec vous seul. »
Je me levai pour partir, mais Holmes me saisit par le poignet
et me repoussa dans le fauteuil.
« Ce sera tous les deux, ou personne ! déclara-t-il. Devant ce
gentleman, vous pouvez dire tout ce que vous me diriez à moi
seul. »
Le comte haussa ses larges épaules.
« Alors je commence, dit-il, par vous demander le secret le
plus absolu pendant deux années ; passé ce délai, l’affaire n’aura
plus d’importance. Pour l’instant, je n’exagère pas en affirmant
qu’elle risque d’influer sur le cours de l’histoire européenne.
– Vous avez ma parole, dit Holmes.
– Et la mienne.
– Pardonnez-moi ce masque, poursuivit notre étrange
visiteur. L’auguste personne qui m’emploie désire que son
collaborateur vous demeure inconnu, et je vous avouerai tout de
suite que le titre sous lequel je me suis présenté n’est pas
exactement le mien.
– Je m’en doutais ! fit sèchement Holmes.
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– Les circonstances sont extrêmement délicates. Il ne faut
reculer devant aucune précaution pour étouffer tout germe de ce
qui pourrait devenir un immense scandale et compromettre
gravement l’une des familles régnantes de l’Europe. Pour parler
clair, l’affaire concerne la grande maison d’Ormstein, d’où sont
issus les rois héréditaires de Bohême.
– Je le savais aussi, murmura Holmes en s’installant dans un
fauteuil et en fermant les yeux. »
Notre visiteur contempla avec un visible étonnement la
silhouette dégingandée, nonchalante de l’homme qui lui avait été
sans nul doute dépeint comme le logicien le plus incisif et le
policier le plus dynamique de l’Europe. Holmes rouvrit les yeux
avec lenteur pour dévisager non sans impatience son client :
« Si Votre Majesté daignait condescendre à exposer le cas où
elle se trouve, observa-t-il, je serais plus à même de la
conseiller. »
L’homme bondit hors de son fauteuil pour marcher de long
en large, sous l’effet d’une agitation qu’il était incapable de
contrôler. Puis, avec un geste désespéré, il arracha le masque qu’il
portait et le jeta à terre.
« Vous avez raison, s’écria-t-il. Je suis le roi. Pourquoi
m’efforcerais-je de vous le cacher ?
– Pourquoi, en effet ? dit Holmes presque à voix basse. Votre
Majesté n’avait pas encore prononcé une parole que je savais que
j’avais en face de moi Wilhelm Gottsreich Sigismond von
Ormstein, grand-duc de Cassel-Falstein, et roi héréditaire de
Bohême.
– Mais vous pouvez comprendre, reprit notre visiteur
étranger qui s’était rassis tout en passant sa main sur son front
haut et blanc, vous pouvez comprendre que je ne suis pas habitué
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à régler ce genre d’affaires par moi-même. Et pourtant il s’agit
d’une chose si délicate que je ne pouvais la confier à un
collaborateur quelconque sans tomber sous sa coupe. Je suis venu
incognito de Prague dans le but de vous consulter.
– Alors, je vous en prie, consultez ! dit Holmes en refermant
les yeux.
– En bref, voici les faits : il y a environ cinq années, au cours
d’une longue visite à Varsovie, j’ai fait la connaissance d’une
aventurière célèbre, Irène Adler. Son nom vous dit sûrement
quelque chose.
– S’il vous plaît, docteur, voudriez-vous regarder sa fiche ?
murmura Holmes sans ouvrir les yeux. »
Depuis plusieurs années, il avait adopté une méthode de
classement pour collationner toutes les informations concernant
les gens et les choses, si bien qu’il était difficile de parler devant
lui d’une personne ou d’un fait sans qu’il ne pût fournir aussitôt
un renseignement. Dans ce cas précis, je trouvai la biographie
d’Irène Adler intercalée entre celle d’un rabbin juif et celle d’un
chef d’état-major qui avait écrit une monographie sur les poissons
des grandes profondeurs sous-marines.
« Voyons, dit Holmes. Hum ! Née dans le New Jersey en
1858. Contralto… Hum ! La Scala… Hum ! Prima donna à l’Opéra
impérial de Varsovie… Oui ! Abandonne la scène… Ah ! Habite à
Londres… Tout à fait cela. A ce que je vois, Votre Majesté s’est
laissé prendre aux filets de cette jeune personne, lui a écrit
quelques lettres compromettantes, et serait aujourd’hui désireuse
qu’elles lui fussent restituées.
– Exactement. Mais comment…
– Y a-t-il eu un mariage secret ?
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– Non.
– Pas de papiers, ni de certificats légaux ?
– Aucun.
– Dans ce cas je ne comprends plus votre Majesté. Si cette
jeune personne essayait de se servir de vos lettres pour vous faire
chanter ou pour tout autre but, comment pourrait-elle prouver
qu’elles sont authentiques ?
– Mon écriture…
– Peuh, peuh ! Des faux !
– Mon papier à lettres personnel…
– Un vol !
– Mon propre sceau…
– Elle l’aura imité !
– Ma photographie…
– Elle l’a achetée !
– Mais nous avons été photographiés ensemble !
– Oh ! la la ! Voilà qui est très mauvais. Votre Majesté a
manqué de distinction.
– Elle m’avait rendu fou : j’avais perdu la tête !
– Vous vous êtes sérieusement compromis.
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– A l’évoque, je n’étais que prince héritier. J’étais jeune.
Aujourd’hui je n’ai que trente ans.
– Il faut récupérer la photographie.
– Nous avons essayé, nous n’avons pas réussi.
– Votre Majesté paiera. Il faut racheter.
– Elle ne la vendra pas.
– La dérober, alors.
– Cinq tentatives ont été effectuées. Deux fois des
cambrioleurs à ma solde ont fouillé sa maison de fond en comble.
Une fois nous avons tendu une véritable embuscade. Aucun
résultat.
– Pas de trace de la photographie ?
– Pas la moindre. »
Holmes éclata de rire :
« Voilà un très joli petit problème ! dit-il.
– Mais qui est très grave pour moi, répliqua le roi sur un ton
de reproche.
– Très grave, c’est vrai. Et que se propose-t-elle de faire avec
cette photographie ?
– Ruiner ma vie.
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– Mais comment ?
– Je suis sur le point de me marier.
– Je l’ai entendu dire.
– Avec Clotilde Lothman de Saxe-Meningen, la seconde fille
du roi de Scandinavie. Vous connaissez peut-être la rigidité des
principes de cette famille : la princesse elle-même est la
délicatesse personnifiée. Si l’ombre d’un doute plane sur ma
conduite, tout sera rompu.
– Et Irène Adler ?
– …Menace de leur faire parvenir la photographie. Et elle le
fera. Je suis sûr qu’elle le fera ! Vous ne la connaissez pas : elle a
une âme d’acier. Elle combine le visage de la plus ravissante des
femmes avec le caractère du plus déterminé des hommes. Plutôt
que de me voir marié avec une autre, elle irait aux pires
extrémités : aux pires !
– Êtes-vous certain qu’elle ne l’a pas encore envoyée ?
– Certain.
– Pourquoi ?
– Parce qu’elle a déclaré qu’elle l’enverrait le jour où les
fiançailles seraient publiées. Or elles seront rendues publiques
lundi prochain.
– Oh ! mais nous avons encore trois jours devant nous ! laissa
tomber Holmes en étouffant un bâillement. Heureusement, car
j’ai pour l’heure une ou deux affaires importantes à régler. Votre
Majesté ne quitte pas Londres ?
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– Non. Vous me trouverez au Langham, sous le nom de comte
von Kramm.
– Alors je vous enverrai un mot pour vous tenir au courant de
la marche de l’affaire.
– Je vous en prie. Je suis terriblement inquiet.
– Et, quant à l’argent ?
– Je vous laisse carte blanche.
– Absolument ?
– Je donnerais l’une des provinces de mon royaume en
échange de cette photographie.
– Et pour les frais immédiats ? »
Le roi chercha sous son manteau une lourde bourse en peau
de chamois et la déposa sur la table.
« Elle contient trois cents livres sterling en or, et sept cents en
billets, dit-il. »
Holmes rédigea un reçu sur une feuille de son carnet, et le lui
tendit.
« Et l’adresse de la demoiselle ? demanda-t-il.
– Briony Lodge, Serpentine Avenue, Saint John’s Wood.
Holmes la nota, avant d’interroger :
– Une autre question : la photographie est format album ?
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– Oui.
– Bien. Bonne nuit, Majesté. J’ai confiance. Nous aurons
bientôt d’excellentes nouvelles à vous communiquer… Et à vous
aussi, bonne nuit, Watson ! ajouta-t-il, lorsque les roues du
landau royal s’ébranlèrent pour descendre la rue. Si vous avez la
gentillesse de passer ici demain après-midi à trois heures, je serai
heureux de bavarder un peu avec vous. »
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II
A trois heures précises j’étais à Baker Street, mais Holmes
n’était pas encore de retour. La logeuse m’indiqua qu’il était sorti
un peu après huit heures du matin. Je m’assis au coin du feu, avec
l’intention de l’attendre aussi longtemps qu’il le faudrait. Déjà
cette histoire me passionnait : elle ne se présentait pas sous
l’aspect lugubre des deux crimes que j’ai déjà relatés : toutefois sa
nature même ainsi que la situation élevée de son héros lui
conféraient un intérêt spécial. Par ailleurs, la manière qu’avait
mon ami de maîtriser une situation et le spectacle de sa logique
incisive, aiguë, me procuraient un vif plaisir : j’aimais étudier son
système de travail et suivre de près les méthodes (subtiles autant
que hardies) grâce aux quelles il désembrouillait les écheveaux les
plus inextricables. J’étais si accoutumé à ses succès que
l’hypothèse d’un échec ne m’effleurait même pas.
Il était près de quatre heures quand la porte s’ouvrit pour
laisser pénétrer une sorte de valet d’écurie qui semblait pris de
boisson : rougeaud, hirsute, il étalait de gros favoris, et ses
vêtements étaient minables. L’étonnant talent de mon ami pour
se déguiser m’était connu, mais je dus le regarder à trois reprises
avant d’être sûr que c’était bien lui. Il m’adressa un signe de tête
et disparut dans sa chambre, d’où il ressortit cinq minutes plus
tard, habillé comme à son ordinaire d’un respectable costume de
tweed. Il plongea les mains dans ses poches, allongea les jambes
devant le feu, et partit d’un joyeux rire qui dura plusieurs
minutes.
« Hé bien ! ça alors ! s’écria-t-il. »
Il suffoquait ; il se reprit à rire, et il rit de si bon coeur qu’il
dut s’étendre, à court de souffle, sur son canapé.
« Que se passe-t-il ?
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– C’est trop drôle ! Je parie que vous ne devinerez jamais
comment j’ai employé ma matinée ni ce que j’ai fini par faire.
– Je ne sais pas… Je suppose que vous avez surveillé les
habitudes et peut- être la maison de Mlle Irène Adler.
– C’est vrai ! Mais la suite n’a pas été banale. Je vais tout vous
raconter. Ce matin, j’ai quitté la maison un peu après huit heures,
déguisé en valet d’écurie cherchant de l’embauche. Car entre les
hommes de chevaux il existe une merveilleuse sympathie,
presque une franc-maçonnerie : si vous êtes l’un des leurs, vous
saurez en un tournemain tout ce que vous désirez savoir. J’ai
trouvé de bonne heure Briony Lodge. Cette villa est un bijou :
situé juste sur la route avec un jardin derrière ; deux étages ; une
énorme serrure à la porte ; un grand salon à droite, bien meublé,
avec de longues fenêtres descendant presque jusqu’au plancher et
pourvues de ces absurdes fermetures anglaises qu’un enfant
pourrait ouvrir. Derrière, rien de remarquable, sinon une fenêtre
du couloir qui peut être atteinte du toit de la remise. J’ai fait le
tour de la maison, je l’ai examinée sous tous les angles, sans
pouvoir noter autre chose d’intéressant. J’ai ensuite descendu la
rue en flânant et j’ai découvert, comme je m’y attendais, une
écurie dans un chemin qui longe l’un des murs du jardin. J’ai
donné un coup de main aux valets qui bouchonnaient les
chevaux : en échange, j’ai reçu une pièce de monnaie, un verre de
whisky, un peu de gros tabac pour bourrer deux pipes, et tous les
renseignements dont j’avais besoin sur Mlle Adler, sans compter
ceux que j’ai obtenus sur une demi-douzaine de gens du voisinage
et dont je me moque éperdument mais il fallait bien que j’écoute
aussi leurs biographies, n’est-ce pas ?
– Quoi, au sujet d’Irène Adler ? demandai-je
– Oh ! elle a fait tourner toutes les têtes des hommes de làbas
! C’est la plus exquise des créatures de cette terre : elle vit
paisiblement, chante à des concerts, sort en voiture chaque jour à
cinq heures, pour rentrer dîner à sept heures précises, rarement à
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d’autres heures, sauf lorsqu’elle chante. Ne reçoit qu’un visiteur
masculin, mais le reçoit souvent. Un beau brun, bien fait,
élégant ; il ne vient jamais moins d’une fois par jour, et plutôt
deux. C’est un M. Godfrey Norton, membre du barreau. Voyez
l’avantage qu’il y a d’avoir des cochers dans sa confidence ! Tous
ceux-là le connaissaient pour l’avoir ramené chacun une douzaine
de fois de Serpentine Avenue. Quand ils eurent vidé leur sac, je fis
les cent pas du côté de la villa tout en élaborant mon plan de
campagne.
« Ce Godfrey Norton était assurément un personnage
d’importance dans notre affaire : un homme de loi ! Cela
s’annonçait mal. Quelle était la nature de ses relations avec Irène
Adler, et pourquoi la visitait-il si souvent ? Était-elle sa cliente,
son amie, ou sa maîtresse ? En tant que cliente, elle lui avait sans
doute confié la photographie pour qu’il la garde. En tant que
maîtresse, c’était moins vraisemblable. De la réponse à cette
question dépendait mon plan : continuerais-je à travailler à
Briony Lodge ? Ou m’occuperais-je plutôt de l’appartement que
ce monsieur possédait dans le quartier des avocats ?… Je crains
de vous ennuyer avec ces détails, mais il faut bien que je vous
expose toutes mes petites difficultés si vous voulez vous faire une
idée exacte de la situation.
– Je vous écoute attentivement.
– J’étais en train de peser le pour et le contre dans ma tête
quand un fiacre s’arrêta devant Briony Lodge ; un gentleman en
sortit- c’était un très bel homme, brun, avec un nez droit, des
moustaches… De toute évidence, l’homme dont on m’avait parlé.
Il semblait très pressé, cria au cocher de l’attendre, et s’engouffra
a l’intérieur dès que la bonne lui eut ouvert la porte : visiblement
il agissait comme chez lui…
« Il y avait une demi-heure qu’il était arrivé ; j’avais pu
l’apercevoir, par les fenêtres du salon, marchant dans la pièce à
grandes enjambées ; il parlait avec animation et il agitait ses bras.
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Elle, je ne l’avais pas vue. Soudain il ressortit ; il paraissait encore
plus nerveux qu’à son arrivée. En montant dans son fiacre, il tira
une montre en or de son gousset :
« – Filez comme le vent ! cria-t-il. D’abord chez Gross et
Hankey à Regent Street, puis à l’église Sainte-Monique dans
Edgware Road. Une demi-guinée pour boire si vous faites la
course en vingt minutes !
« Les voilà partis. Je me demande ce que je dois faire, si je ne
ferais pas mieux de les suivre, quand débouche du chemin un
coquet petit landau ; le cocher a son vêtement à demi boutonné,
sa cravate sous l’oreille ; les attaches du harnais sortent des
boucles ; le landau n’est même pas arrêté qu’elle jaillit du
vestibule pour sauter dedans. Je ne l’ai vue que le temps d’un
éclair, mais je peux vous affirmer que c’est une fort jolie femme,
et qu’un homme serait capable de se faire tuer pour ce visage-là
« – A l’église Sainte-Monique, John ! crie-t-elle. Et un demi
souverain si vous y arrivez en vingt minutes !
« C’est trop beau pour que je rate l’occasion. J’hésite : vais je
courir pour rattraper le landau et monter dedans, ou me cacher
derrière. Au même moment, voici un fiacre. Le cocher regarde à
deux fois le client déguenillé qui lui fait signe, mais je ne lui laisse
pas le temps de réfléchir, je saute :
« – A l’église Sainte-Monique ! lui dis je. Et un demisouverain
pour vous si vous y êtes en moins de vingt minutes !
« Il était midi moins vingt-cinq ; naturellement, ce qui se
manigançait était clair comme le jour.
« Mon cocher fonça. Je ne crois pas que j’aie jamais été
conduit aussi vite, mais les autres avaient pris de l’avance. Quand
j’arrive, le fiacre et le landau sont arrêtés devant la porte, leurs
chevaux fument. Moi, je paie mon homme et me précipite dans
- 22 -
l’église. Pas une âme à l’intérieur, sauf mes deux poursuivis et un
prêtre en surplis qui semblent discuter ferme. Tous trois se
tiennent debout devant l’autel. Je prends par un bas-côté, et je
flâne comme un oisif qui visite une église. Tout à coup, à ma
grande surprise, mes trois personnages se tournent vers moi, et
Godfrey Norton court à ma rencontre.
« – Dieu merci ! s’écrie-t-il. Vous ferez l’affaire. Venez !
Venez ! »
« – Pour quoi faire ?
« – Venez, mon vieux ! Il ne nous reste plus que trois minutes
pour que ce soit légal.
« Me voilà à moitié entraîné vers l’autel et, avant que je sache
où j’en suis, je m’entends bredouiller des réponses qui me sont
chuchotées à l’oreille ; en fait, j’apporte ma garantie au sujet de
choses dont je suis très ignorant et je sers de témoin pour un
mariage entre Irène Adler, demoiselle, et Godfrey Norton,
célibataire. La cérémonie se déroule en quelques instants ; après
quoi je me fais congratuler d’un côté par le conjoint, de l’autre par
la conjointe tandis que le prêtre, en face, rayonne en me
regardant. Je crois que c’est la situation la plus absurde dans
laquelle je me sois jamais trouvé ; lorsque je me la suis rappelée
tout à l’heure, je n’ai pu m’empêcher de rire à gorge déployée.
Sans doute y avait-il un quelconque vice de forme dans la licence
de mariage, le prêtre devait absolument refuser de consacrer
l’union sans un témoin, et mon apparition a probablement
épargné au fiancé de courir les rues en quête d’un homme valable.
La fiancée m’a fait cadeau d’un souverain, que j’entends porter à
ma chaîne de montre en souvenir de cet heureux événement.
– L’affaire a pris une tournure tout à fait imprévue, dis je.
Mais ensuite ?
- 23 -
– Hé bien ! J’ai trouvé mes plans plutôt compromis. Tout
donnait l’impression que le couple allait s’envoler
immédiatement ; des mesures aussi énergiques que promptes
s’imposaient donc. Cependant, à la porte de l’église, ils partirent
chacun de leur côté : lui vers son quartier, elle pour sa villa.
« – Je sortirai à cinq heures comme d’habitude pour aller
dans le parc, lui dit-elle en le quittant.
« Je n’entendis rien de plus. Ils se séparèrent, et moi, je m’en
vais prendre des dispositions personnelles.
– Lesquelles ?
– D’abord quelques tranches de boeuf froid et un verre de
bière répondit-il en sonnant. J’étais trop occupé pour songer à me
nourrir, et ce soir, je serai encore plus occupé, selon toute
vraisemblance. A propos, docteur, j’aurais besoin de vos services.
– Vous m’en voyez réjoui.
– Cela ne vous gênerait pas de violer la loi ?
– Pas le moins du monde.
– Ni de risquer d’être arrêté ?
– Non, si la cause est bonne.
– Oh ! la cause est excellente !
– Alors je suis votre homme.
– J’étais sûr que je pourrais compter sur vous.
- 24 -
– Mais qu’est-ce que vous voulez au juste ?
– Quand Mme Turner aura apporté le plateau, je vous
expliquerai. Maintenant, ajouta-t-il en se jetant sur la simple
collation que sa propriétaire lui avait fait monter, je vais être
obligé de parler la bouche pleine car je ne dispose pas de
beaucoup de temps. Il est près de cinq heures. Dans deux heures
nous devons nous trouver sur les lieux de l’action. Mlle Irène, ou
plutôt Madame, revient de sa promenade à sept heures. Il faut
que nous soyons à Briony Lodge pour la rencontrer.
– Et après, quoi ?
– Laissez le reste à mon initiative. J’ai déjà préparé ce qui
doit arriver. Le seul point sur lequel je dois insister, c’est que vous
n’interviendrez à aucun moment, quoi qu’il se passe.
– Je resterai neutre ?
– Vous ne ferez rien, absolument rien. Il y aura probablement
pour moi quelques désagréments légers à encourir. Ne vous en
mêlez point. Tout se terminera par mon transport dans la villa.
Quatre ou cinq minutes plus tard, la fenêtre du salon sera
ouverte. Vous devrez vous tenir tout près de cette fenêtre ouverte.
– Oui.
– Vous devrez me surveiller, car je serai visible.
– Oui.
– Et quand je lèverai ma main… comme ceci… vous lancerez
dans la pièce, ce que je vous remettrai pour le lancer et, en même
temps, vous crierez au feu. Vous suivez bien ?
– Très bien.
- 25 -
– Il n’y a rien là de formidable, dit-il en prenant dans sa
poche un long rouleau en forme de cigare. C’est une banale fusée
fumigène ; à chaque extrémité elle est garnie d’une capsule
automatiquement inflammable. Votre mission se réduit à ce que
je vous ai dit. Quand vous crierez au feu, des tas de gens crieront
à leur tour au feu. Vous pourrez alors vous promener jusqu’au
bout de la rue où je vous rejoindrai dix minutes plus tard.
J’espère que je me suis fait comprendre ?
– J’ai à ne pas intervenir, à m’approcher de la fenêtre, à
guetter votre signal, à lancer à l’intérieur cet objet, puis à crier au
feu, et à vous attendre au coin de la rue.
– Exactement.
– Vous pouvez donc vous reposer sur moi.
– Parfait ! Il est presque temps que je me prépare pour le
nouveau rôle que je vais jouer. »
Il disparut dans sa chambre, et réapparut au bout de
quelques minutes sous l’aspect d’un clergyman non conformiste,
aussi aimable que simplet. Son grand chapeau noir, son ample
pantalon, sa cravate blanche, son sourire sympathique et tout son
air de curiosité bienveillante étaient dignes d’un plus grand
comédien. Holmes avait pas seulement changé de costume : son
expression, son allure, son âme même semblaient se modifier à
chaque nouveau le. Le théâtre a perdu un merveilleux acteur, de
même que la science a perdu un logicien de premier ordre, quand
il s’est spécialisé dans les affaires criminelles.
Nous quittâmes Baker Street à six heures et quart pour nous
trouver à sept heures moins dix dans Serpentine Avenue. La nuit
tombait déjà. Les lampes venaient d’être allumées quand nous
passâmes devant Briony Lodge. La maison ressemblait tout à fait
à celle que m’avait décrite Holmes, mais les alentours n’étaient
- 26 -
pas aussi déserts que je me l’étais imaginé : ils étaient pleins au
contraire d’une animation qu’on n’aurait pas espérée dans la
petite rue d’un quartier tranquille. A un angle, il y avait un groupe
de pauvres hères qui fumaient et riaient ; non loin, un rémouleur
avec sa roue, puis deux gardes en flirt avec une nourrice ; enfin,
plusieurs jeunes gens bien vêtus, cigare aux lèvres, flânaient sur
la route.
« Voyez ! observa Holmes tandis que nous faisions les cent
pas le long de la façade de la villa. Ce mariage simplifie plutôt les
choses : la photographie devient maintenant une arme à double
tranchant. Il y a de fortes chances pour qu’elle ne tienne pas plus
à ce que M. Godfrey Norton la voie, que notre client ne tient à ce
qu’elle tombe sous les yeux de sa princesse. Mais où la
découvrirons-nous ?
– Oui. Où ?
– Il est probable qu’elle ne la transporte pas avec elle,
puisqu’il s’agit d’une photographie format album, trop grande par
conséquent pour qu’une dame la dissimule aisément dans ses
vêtements. Elle sait que le roi est capable de lui tendre une
embuscade et de la faire fouiller, puisqu’il l’a déjà osé. Nous
pouvons donc tenir pour certain qu’elle ne la porte pas sur elle.
– Où, alors ?
– Elle a pu la mettre en sécurité chez son banquier ou chez
son homme de loi. Cette double possibilité existe, mais je ne crois
ni à l’une ni à l’autre. Les femmes sont naturellement
cachottières, et elles aiment pratiquer elles-mêmes leur manie.
Pourquoi l’aurait-elle remise à quelqu’un ? Autant elle peut se fier
à bon droit à sa propre vigilance, autant elle a de motifs de se
méfier des influences, politiques ou autres, qui risqueraient de
s’exercer sur un homme d’affaires. Par ailleurs, rappelez-vous
qu’elle a décidé de s’en servir sous peu : la photographie doit donc
se trouver à portée de sa main, chez elle.
- 27 -
– Mais elle a été cambriolée deux fois !
– Bah ! Les cambrioleurs sont passés à côté…
– Mais comment chercherez-vous ?
– Je ne chercherai pas.
– Alors ?…
– Je me débrouillerai pour qu’elle me la montre.
– Elle refusera !
– Elle ne pourra pas faire autrement… Mais j’entends le
roulement de la voiture ; c’est son landau. A présent, suivez mes
instructions à la lettre. »
Tandis qu’il parlait, les lanternes latérales de la voiture
amorcèrent le virage dans l’avenue ; c’était un très joli petit
landau ! Il roula jusqu’à la porte de Briony Lodge ; au moment où
il s’arrêtait, l’un des flâneurs du coin se précipita pour ouvrir la
portière dans l’espoir de recevoir une pièce de monnaie ; mais il
fut écarté d’un coup de coude par un autre qui avait couru dans la
même intention Une violente dispute s’engagea alors ; les deux
gardes prirent parti pour l’un des vagabonds, et le rémouleur
soutint l’autre de la voix et du geste. Des coups furent échangés,
et en un instant la dame qui avait sauté à bas de la voiture se
trouva au centre d’une mêlée confuse d’hommes qui se battaient à
grands coups de poing et de gourdin. Holmes, pour protéger la
dame, se jeta parmi les combattants ; mais juste comme il
parvenait à sa hauteur, il poussa un cri et s’écroula sur le sol, le
visage en sang. Lorsqu’il tomba, les gardes s’enfuirent dans une
direction, et les vagabonds dans la direction opposée ; les gens
mieux vêtus, qui avaient assisté à la bagarre sans s’y mêler, se
- 28 -
décidèrent alors à porter secours à la dame ainsi qu’au blessé.
Irène Adler, comme je l’appelle encore, avait bondi sur les
marches ; mais elle demeura sur le perron pour regarder ; son
merveilleux visage profilait beaucoup de douceurs sous l’éclairage
de l’entrée.
« Est-ce que ce pauvre homme est gravement blessé ?
s’enquit-elle.
– Il est mort ! crièrent plusieurs voix.
– Non, non, il vit encore ! hurla quelqu’un. Mais il mourra
sûrement avant d’arriver à l’hôpital.
– Voilà un type courageux ! dit une femme. Ils auraient pris à
la dame sa bourse et sa montre s’il n’était pas intervenu. C’était
une bande, oui ! et une rude bande ! Ah ! il se ranime
maintenant…
– On ne peut pas le laisser dans la rue. Peut-on le transporter
chez vous, madame ?
– Naturellement ! Portez-le dans le salon ; il y a un lit de
repos confortable. Par ici, s’il vous plaît ! »
Lentement, avec une grande solennité, il fut transporté à
l’intérieur de Briony Lodge et déposé dans la pièce principale : de
mon poste près de la fenêtre, j’observai les allées et venues. Les
lampes avaient été allumées, mais les stores n’avaient pas été
tirés, si bien que Je pouvais apercevoir Holmes étendu sur le lit.
J’ignore s’il était à cet instant, lui, bourrelé de remords, mais je
sais bien que moi, pour ma part, je ne m’étais jamais senti aussi
honteux que quand je vis quelle splendide créature était la femme
contre laquelle nous conspirions, et quand j’assistai aux soins
pleins de grâce et de bonté qu’elle prodiguait au blessé. Pourtant
ç’aurait été une trahison (et la plus noire) à l’égard de Holmes si
je m’étais départi du rôle qu’il m’avait assigné. J’endurcis donc
- 29 -
mon coeur et empoignai ma fusée fumigène. « Après tout, me disje,
nous ne lui faisons aucun mal, et nous sommes en train de
l’empêcher de nuire à autrui. »
Holmes s’était mis sur son séant, et je le vis s’agiter comme
un homme qui manque d’air. Une bonne courut ouvrir la fenêtre.
Au même moment il leva la main : c’était le signal. Je jetai ma
fusée dans la pièce et criai :
« Au feu ! »
Le mot avait à peine jailli de ma gorge que toute la foule des
badauds qui stationnaient devant la maison, reprit mon cri en
choeur :
« Au feu ! »
Des nuages d’une fumée épaisse moutonnaient dans le salon
avant de s’échapper par la fenêtre ouverte. J’aperçus des
silhouettes qui couraient dans tous les sens ; puis j’entendis la
voix de Holmes affirmer que c’était une fausse alerte. Alors je me
glissai parmi la foule et je marchai jusqu’au coin de la rue. Au
bout d’une dizaine de minutes, j’eus la joie de sentir le bras de
mon ami sous le mien et de quitter ce mauvais théâtre. Il
marchait rapidement et en silence ; ce fut seulement lorsque nous
empruntâmes l’une des paisibles petites rues qui descendent vers
Edgware Road qu’il se décida à parler.
« Vous avez très bien travaillé, docteur ! me dit-il. Rien
n’aurait mieux marché.
– Vous avez la photographie ?
– Je sais où elle est.
– Et comment l’avez-vous appris ?
- 30 -
– Elle me l’a montrée, comme je vous l’avais annoncé.
– Je n’y comprends goutte, Holmes.
– Je n’ai pas l’intention de jouer avec vous au mystérieux,
répondit-il en riant. L’affaire fut tout à fait simple. Vous, bien sûr,
vous avez deviné que tous les gens de la rue étaient mes
complices : je les avais loués pour la soirée.
– Je l’avais deviné… à peu près.
– Quand se déclencha la bagarre, j’avais de la peinture rouge
humide dans la paume de ma main. Je me suis précipité, je suis
tombé, j’ai appliqué ma main contre mon visage, et je suis devenu
le piteux spectacle que vous avez eu sous les yeux. C’est une vieille
farce.
– Ça aussi, je l’avais soupçonné !
– Ils m’ont donc transporté chez elle ; comment aurait-elle pu
refuser de me laisser entrer ? Que pouvait-elle objecter ? J’ai été
conduit dans son salon, qui était la pièce, selon moi, suspecte.
C’était ou le salon ou sa chambre, et j’étais résolu à m’en assurer
Alors j’ai été couché sur un lit, j’ai réclamé un peu d’air, on a dû
ouvrir la fenêtre, et vous avez eu votre chance.
– Comment cela vous a-t-il aidé ?
– C’était très important ! Quand une femme croit que le feu
est à sa maison, son instinct lui commande de courir vers l’objet
auquel elle attache la plus grande valeur pour le sauver des
flammes. Il s’agit là d’une impulsion tout à fait incontrôlable, et je
m’en suis servi plus d’une fois : tenez, dans l’affaire du Château d
Arnsworth, et aussi dans le scandale de la substitution de
Darlington. Une mère se précipite vers son enfant ; une
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demoiselle vers son coffret à bijoux. Quant à notre dame
d’aujourd’hui, j’étais bien certain qu’elle ne possédait chez elle
rien de plus précieux que ce dont nous étions en quête. L’alerte
fut admirablement donnée. La fumée et les cris auraient brisé des
nerfs d’acier ! Elle a magnifiquement réagi. La photographie se
trouve dans un renfoncement du mur derrière un panneau à
glissières juste au-dessus de la sonnette. Elle y fut en un instant et
je pus apercevoir l’objet au moment où elle l’avait à demi sorti.
Quand je criai que c’était une fausse alerte, elle le replaça, ses
yeux tombèrent sur la fusée, elle courut au dehors, et je ne la revis
plus. Je me mis debout, et après force excuses, sortis de la
maison. J’ai bien songé à m’emparer tout de suite de la
photographie, mais le cocher est entré ; il me surveillait de près :
je crus plus sage de ne pas me risquer : un peu trop de
précipitation aurait tout compromis !
– Et maintenant ? demandai-je.
– Pratiquement notre enquête est terminée. J’irai demain lui
rendre visite avec le roi et vous-même, si vous daignez nous
accompagner. On nous conduira dans le salon pour attendre la
maîtresse de maison ; mais il est probable que quand elle viendra
elle ne trouvera plus ni nous ni la photographie. Sa Majesté sera
sans doute satisfaite de la récupérer de ses propres mains.
– Et quand lui rendrons-nous visite ?
– A huit heures du matin. Elle ne sera pas encore levée, ni
apprêtée, si bien que nous aurons le champ libre. Par ailleurs il
nous faut être rapides, car ce mariage peut modifier radicalement
ses habitudes et son genre de vie. Je vais télégraphier au roi. »
Nous étions dans Baker Street, arrêtés devant la porte.
Holmes cherchait sa clé dans ses poches lorsqu’un passant lui
lança :
« Bonne nuit, monsieur Sherlock Holmes ! »
- 32 -
Il y avait plusieurs personnes sur le trottoir ; ce salut semble
venir néanmoins d’un jeune homme svelte qui avait passé très
vite.
« Je connais cette voix, dit Holmes en regardant la rue
faiblement éclairée. Mais je me demande à qui diable elle
appartient ! »
- 33 -
III
Je dormis à Baker Street cette nuit-là ; nous étions en train de
prendre notre café et nos toasts quand le roi de Bohême pénétra
dans le bureau.
« C’est vrai ? Vous l’avez eue ? cria-t-il en empoignant
Holmes par les deux épaules et en le dévisageant intensément.
– Pas encore.
– Mais vous avez bon espoir ?
– J’ai espoir.
– Alors, allons-y. Je ne tiens plus en place.
– Il nous faut un fiacre.
– Non ; mon landau attend en bas.
– Cela simplifie les choses. »
Nous descendîmes et, une fois de plus, nous reprîmes la route
de Briony Lodge.
« Irène Adler est mariée, annonça Holmes.
– Mariée ? Depuis quand ?
– Depuis hier.
– Mais à qui ?
– A un homme de loi qui s’appelle Norton.
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– Elle ne l’aime pas. J’en suis sûr !
– J’espère qu’elle l’aime.
– Pourquoi l’espérez-vous ?
– Parce que cela éviterait à Votre Majesté de redouter tout
ennui pour l’avenir. Si cette dame aime son mari, c’est qu’elle
n’aime pas Votre Majesté. Si elle n’aime pas Votre Majesté, il n’y a
aucune raison pour qu’elle se mette en travers des plans de Votre
Majesté.
– Vous avez raison. Et cependant… Ah ! je regrette qu’elle
n’ait pas été de mon rang ! Quelle reine elle aurait fait ! »
Il tomba dans une rêverie maussade qui dura jusqu’à
Serpentine Avenue.
La porte de Briony Lodge était ouverte, et une femme âgée se
tenait sur les marches. Elle nous regarda descendre du landau
avec un oeil sardonique.
« Monsieur Sherlock Holmes, je pense ? interrogea-t-elle.
– Je suis effectivement M. Holmes, répondit mon camarade
en la considérant avec un étonnement qui n’était pas joué.
– Ma maîtresse m’a dit que vous viendriez probablement ce
matin. Elle est partie, avec son mari, au train de cinq heures
quinze à Charing Cross, pour le continent.
– Quoi ! s’écria Sherlock Holmes en reculant. Voulez-vous
dire qu’elle a quitté l’Angleterre ? »
- 35 -
Son visage était décomposé, blanc de déception et de
surprise. Elle ne reviendra jamais !
« Et les papiers ? gronda le roi. Tout est perdu !
– Nous allons voir… »
Il bouscula la servante et se rua dans le salon ; le roi et moi
nous nous précipitâmes à sa suite. Les meubles étaient dispersés
à droite et à gauche, les étagères vides, les tiroirs ouverts : il était
visible que la dame avait fait ses malles en toute hâte avant de
s’enfuir. Holmes courut vers la sonnette, fit glisser un petit
panneau, plongea sa main dans le creux mis à découvert, retira
une photographie et une lettre. La photographie était celle d’Irène
Adler elle-même en robe du soir. La lettre portait la suscription
suivante : « A Sherlock Holmes, qui passera prendre. » Mon ami
déchira l’enveloppe ; tous les trois nous nous penchâmes sur la
lettre ; elle était datée de la veille à minuit, et elle était rédigée en
ces termes :
Mon cher Monsieur Sherlock Holmes
Vous avez réellement bien joué ! Vous m’avez complètement
surprise. Je n’avais rien soupçonné, même après l’alerte au feu.
Ce n’est qu’ensuite, lorsque j’ai réfléchi que je m’étais trahie moimême,
que j’ai commencé à m’inquiéter. J’étais prévenue contre
lui depuis plusieurs mois. On m’avait informée que si le roi
utilisait un policier, ce serait certainement à vous qu’il ferait
appel. Et on m’avait donné votre adresse. Pourtant, avec votre
astuce, vous m’avez amenée à vous révéler ce que vous désiriez
savoir. Lorsque des soupçons me sont venus, j’ai été prise de
remords : penser du mal d’un clergyman aussi âgé, aussi
respectable, aussi galant !
Mais, vous le savez, j’ai été entraînée, moi aussi, à jouer la
comédie ; et le costume masculin m’est familier : j’ai même
souvent profité de la liberté d’allure qu’il autorise. Aussi ai-je
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demandé à John, le cocher, de vous surveiller ; et moi, je suis
montée dans ma garde-robe, j’ai enfilé mon vêtement de sortie,
comme je l’appelle, et je suis descendue au moment précis où
vous vous glissiez dehors. Hé bien ! je vous ai suivi jusqu’à votre
porte, et j’ai ainsi acquis la certitude que ma personne
intéressait vivement le célèbre M. Sherlock Holmes. Alors, avec
quelque imprudence, je vous ai souhaité une bonne nuit, et j’ai
couru conférer avec mon mari. Nous sommes tombés d’accord
sur ceci : la fuite était notre seule ressource pour nous défaire
d’un adversaire aussi formidable. C’est pourquoi vous trouverez
le nid vide lorsque vous viendrez demain Quant à la
photographie, que votre client cesse de s’en inquiéter ! J’aime et
je suis aimée. J’ai rencontré un homme meilleur que lui. Le roi
pourra agir comme bon lui semblera sans avoir rien à redouter
d’une femme qu’il a cruellement offensée. Je ne la garde pardevers
moi que pour ma sauvegarde personnelle, pour conserver
une arme qui me protégera toujours contre les ennuis qu’il
pourrait chercher à me causer dans l’avenir. Je laisse ici une
photographie qu’il lui plaira peut-être d’emporter. Et je
demeure, cher Monsieur Sherlock Holmes, très sincèrement
vôtre !
Irène Norton, née Adler.
« Quelle femme ! Oh ! quelle femme ! s’écria le roi de Bohême
quand nous eûmes achevé la lecture de cette épître. Ne vous
avais-je pas dit qu’elle était aussi prompte que résolue ? N’auraitelle
pas été une reine admirable ? Quel malheur qu’elle ne soit pas
de mon rang !
– D’après ce que j’ai vu de la dame, elle ne semble pas en
vérité du même niveau que Votre Majesté ! répondit froidement
Holmes. Je regrette de n’avoir pas été capable de mener cette
affaire à une meilleure conclusion.
– Au contraire, cher monsieur ! cria le roi. Ce dénouement
m’enchante : je sais qu’elle tient toujours ses promesses ! La
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photographie est à présent aussi en sécurité que si elle avait été
jetée au feu.
– Je suis heureux d’entendre Votre Majesté parler ainsi.
– J’ai contracté une dette immense envers vous ! Je vous en
prie ; dites-moi de quelle manière je puis vous récompenser.
Cette bague… »
Il fit glisser de son doigt une émeraude et la posa sur la
paume ouverte de sa main.
« Votre Majesté possède quelque chose que j’évalue à plus
cher, dit Holmes.
– Dites-moi quoi : c’est à vous.
– Cette photographie ! »
Le roi le contempla avec ahurissement.
« La photographie d’Irène ? Bien sûr, si vous y tenez !
– Je remercie Votre Majesté. Maintenant, l’affaire est
terminée J’ai l’honneur de souhaiter à Votre Majesté une bonne
matinée. »
Il s’inclina et se détourna sans remarquer la main que lui
tendait le roi. Bras dessus, bras dessous, nous regagnâmes Baker
Street.
Et voici pourquoi un grand scandale menaçait le royaume de
Bohême, et comment les plans de M. Sherlock Holmes furent
déjoués par une femme. Il avait l’habitude d’ironiser sur la
rouerie féminine ; depuis ce jour il évite de le faire. Et quand il
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parle d’Irène Adler, ou quand il fait allusion à sa photographie,
c’est toujours sous le titre très honorable de la femme.
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Toutes les aventures de Sherlock Holmes
Liste des quatre romans et cinquante-six nouvelles qui
constituent les aventures de Sherlock Holmes, publiées par Sir
Arthur Conan Doyle entre 1887 et 1927.
Romans
* Une Étude en Rouge (novembre 1887)
* Le Signe des Quatre (février 1890)
* Le Chien des Baskerville (août 1901 à mai 1902)
* La Vallée de la Peur (sept 1914 à mai 1915)
Les Aventures de Sherlock Holmes
* Un Scandale en Bohême (juillet 1891)
* La Ligue des Rouquins (août 1891)
* Une Affaire d’Identité (septembre 1891)
* Le Mystère de Val Boscombe (octobre 1891)
* Les Cinq Pépins d’Orange (novembre 1891)
* L’Homme à la Lèvre Tordue (décembre 1891)
* L’Escarboucle Bleue (janvier 1892)
* Le Ruban Moucheté (février 1892)
* Le Pouce de l’Ingénieur (mars 1892)
* Un Aristocrate Célibataire (avril 1892)
* Le Diadème de Beryls (mai 1892)
* Les Hêtres Rouges (juin 1892)
Les Mémoires de Sherlock Holmes
* Flamme d’Argent (décembre 1892)
* La Boite en Carton (janvier 1893)
* La Figure Jaune (février 1893)
* L’Employé de l’Agent de Change (mars 1893)
* Le Gloria-Scott (avril 1893)
* Le Rituel des Musgrave (mai 1893)
* Les Propriétaires de Reigate (juin 1893)
* Le Tordu (juillet 1893)
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* Le Pensionnaire en Traitement (août 1893)
* L’Interprète Grec (septembre 1893)
* Le Traité Naval (octobre / novembre 1893)
* Le Dernier Problème (décembre 1893)
Le Retour de Sherlock Holmes
* La Maison Vide (26 septembre 1903)
* L’Entrepreneur de Norwood (31 octobre 1903)
* Les Hommes Dansants (décembre 1903)
* La Cycliste Solitaire (26 décembre 1903)
* L’École du prieuré (30 janvier 1904)
* Peter le Noir (27 février 1904)
* Charles Auguste Milverton (26 mars 1904)
* Les Six Napoléons (30 avril 1904)
* Les Trois Étudiants (juin 1904)
* Le Pince-Nez en Or (juillet 1904)
* Un Trois-Quarts a été perdu (août 1904)
* Le Manoir de L’Abbaye (septembre 1904)
* La Deuxième Tâche (décembre 1904)
Son Dernier Coup d’Archet
* L’aventure de Wisteria Lodge (15 août 1908)
* Les Plans du Bruce-Partington (décembre 1908)
* Le Pied du Diable (décembre 1910)
* Le Cercle Rouge (mars/avril 1911)
* La Disparition de Lady Frances Carfax (décembre 1911)
* Le détective agonisant (22 novembre 1913)
* Son Dernier Coup d’Archet (septembre 1917)
Les Archives de Sherlock Holmes
* La Pierre de Mazarin (octobre 1921)
* Le Problème du Pont de Thor (février et mars 1922)
* L’Homme qui Grimpait (mars 1923)
* Le Vampire du Sussex (janvier 1924)
* Les Trois Garrideb (25 octobre 1924)
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* L’Illustre Client (8 novembre 1924)
* Les Trois Pignons (18 septembre 1926)
* Le Soldat Blanchi (16 octobre 1926)
* La Crinière du Lion (27 novembre 1926)
* Le Marchand de Couleurs Retiré des Affaires (18 décembre.
1926)
* La Pensionnaire Voilée (22 janvier 1927)
* L’Aventure de Shoscombe Old Place (5 mars 1927)
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17 septembre 2003
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